Monsieur Paul

L'unique fenêtre de la chambre de bonne de la rue Quincampoix n'avait pas de rideau. Au milieu une chaise accompagnait une table vide éclairée d' une ampoule de 40 watts transparente à baïonnette pendant au bout de deux fils électriques recouvert de tissus sortant directement d'un plafond qui n'avait jamais connu les joies de la peinture. Dans un coin, était accroché au mur un vieux lavabo orné d'un seul robinet. Au dessus, une petit étagère sur laquelle reposait une assiette en porcelaine blanche,un verre, un couteau, une fourchette, une brosse à dents, un tube de dentifrice et un morceau de savon, supportait un bout de glace faisant office de miroir. A côté, se trouvaient trois morceaux de métal sortant du mur à environ 1m80 sur lesquels étaient accrochés un vieux manteau aux revers en fourrure, un costume à la forme un peu vieillotte et une chemise à faux col.
Au sol, une paire de chaussures contenant une unique paire de chaussettes. Dans le coin opposé, dans un lit ne possédant qu'une vieille couverture, monsieur Paul, en pyjama, se souvenait du mois d'octobre 1917. Il se souvenait du jour où son oncle lui remit la somme d'argent qu'il avait sauvé tant bien que mal de la fortune de ses parents, en lui recommandant d'essayer de fuir jusqu'à Paris ou Londres par les routes,car Moscou n'était plus sûr pour un jeune aristocrate russe.
Il leva la main pour atteindre l'interrupteur, éteignit la lumière puis, avant de fermer les yeux, réalisa qu'il n'avait passé les 68 dernières années qu'à mourir.

 
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